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3 mai 2012 12 Commentaires
3 mai 2012 12 Commentaires
Par Eric Granger | La hausse
des droits de scolarité au Québec s’insère dans un processus de
privatisation mondiale de l’éducation, un processus dicté par une élite
mondialiste dont Jean Charest fait partie.
L’entêtement du gouvernement Charest à
vouloir augmenté les droits de scolarité, à bonifier les prêts étudiants
et à instaurer un régime de remboursement proportionnel au revenu
(RPR), cet entêtement est facile à comprendre lorsqu’on regarde de plus
près d’où proviennent ces idées de réformes de l’éducation. Il ne s’agit
pas d’idées qui sont sorties du cerveau du Premier ministre ou de la
ministre de l’éducation, ces idées viennent de l’extérieur, ces réformes
ont été conçues loin du Québec, dans des institutions internationales à
vocation de mondialisation. Le gouvernement du Québec suit un plan, un
modèle concocté dans les grandes universités mondialistes comme la
London School of Economics et promu par des institutions internationales
toutes puissantes telles le Fond monétaire international, la Banque
mondiale et l’OCDE. Ce modèle a été fabriqué sur mesure pour satisfaire
les besoins de l’entreprise privée (lire multinationales) et on peut
aisément le décrire comme une privatisation mondiale de l’éducation
supérieure. Le Premier ministre Jean Charest est quant à lui un complice
enthousiaste de cette privatisation à l’échelle mondiale.
De l’Angleterre au reste du monde
Le programme mondial de privatisation du
financement de l’éducation a débuté en Angleterre en 1998. Le
gouvernement britannique avait à cette époque implanté le remboursement
proportionnel au revenu. Ce concept qui a d’abord été mis de l’avant par
l’économiste Milton Friedman a été repris par un autre : Nicholas Barr.
Nicholas Barr est un professeur d’économie à la London School of Economics, il est un boursier Fulbright,
il a travaillé pour la Banque mondiale, le FMI et il défend depuis les
années 80 l’idée d’une privatisation du financement de l’éducation
supérieure. Il fait également la promotion du remboursement
proportionnel au revenu (RPR) pour s’acquitter d’une dette étudiante. Il
a publié plusieurs ouvrages et articles à ce sujet. Dans un article publié en 2005 dans la revue Finance et développement
(une publication mensuelle du FMI), Barr écrit : « Les réformes
entreprises en Grande-Bretagne peuvent servir d’exemple à d’autres
pays ». Il propose d’abord de décentraliser le financement (dehors le
gouvernement, bienvenue secteur privé). Il propose, en deuxième lieu, de
transférer aux étudiants le coût des études. Ces derniers devront
s’endetter auprès de banques privées pour les payer. Et troisièmement,
il suggère l’implantation d’un RPR pour rembourser la dette.
Selon Barr, le RPR permet de maintenir
l’accessibilité aux études supérieures pour les moins fortunés. Il
s’agit d’une logique douteuse. Selon lui, les diplômés qui auront un
faible revenu annuel ne seront pas pénalisés puisqu’ils rembourseront
leurs prêts en fonction d’un pourcentage de leurs revenus. Cependant,
ils rembourseront pour une durée beaucoup plus longue leurs prêts
étudiants. Dans cette même logique, Barr affirme que l’on peut ainsi
augmenter les droits de scolarité et même les intérêts sur les prêts, la
durée du remboursement sera tout simplement prolongée. Barr oublie de
mentionner dans toutes ses publications que plus on prend du temps à
rembourser un prêts, plus on paie d’intérêts aux banques. Donc, un
diplômé pourrait se retrouver à payer deux fois le montant utilisé pour
faire ses études. Et Barr oublie aussi de mentionner que l’endettement
étudiant sous cette forme se traduit en un véritable esclavage bancaire.
En fait, c’est probablement ce qu’il souhaite en secret.
Nicholas Barr, dans son article cité plus haut,
ose se justifier en écrivant que « l’éducation tertiaire est souvent
présentée comme un droit qui, en tant que tel, devrait être financé par
l’État. L’alimentation est, elle aussi, considérée comme un droit
fondamental, mais personne ne voit d’inconvénients à ce que les aliments
aient un prix. » Sauf que dans la société, les riches mangent du caviar
et que les pauvres se contentent de patates bouillies. C’est et ce sera
la même chose dans le cas de l’éducation.
Les mesures prônées par Nicholas Barr et
les institutions mondialistes qui payent son salaire ont été implanté en
Australie, en Nouvelle-Zélande et aux Etats-Unis pour ne nommer que
ceux-là et elles font maintenant leur entrée au Québec
Le cas du Québec
Au Québec, une réforme du régime de prêts
et bourses a été entreprise en 2003-2004 afin de le privatiser. Cette
année-là, 103 millions de dollars de bourses ont été convertis en prêts.
De plus, ces prêts devaient à l’avenir être contractés auprès des
institutions financières privées du Québec, des prêts qui sont garantis
aux banques par le gouvernement en cas de non-paiement. Une contestation
étudiante a pris forme en 2005 pour dénoncer cette hausse des prêts. La
FEUQ et la FECQ ont alors négocié une entente avec le gouvernement et
le montant des prêts a été ramené, en 2006-2007, au niveau précédent la
réforme. Toutefois, les étudiants se sont endettés pour environ 140
millions de dollars de plus durant cette période. Cependant, la
privatisation de l’endettement est restée intacte. Les étudiants doivent
toujours emprunter aux banques privées pour financer leurs études. Le
gouvernement garantit encore les prêts aux institutions financières. Ce sont des prêts sans risques pour les banques, gracieuseté du gouvernement Charest. Evidemment, les banques sont contentes.
Aujourd’hui, nous sommes témoins de la
deuxième phase de cette privatisation. Le gouvernement Charest, dans la
dernière proposition faites aux étudiants en grève, veut maintenant
augmenter de nouveau les prêts étudiants et instaurer le RPR. Selon le communiqué émis par le gouvernement,
« tous les étudiants dont le revenu des parents n’excède pas 100 000 $
bénéficieront d’un prêt permettant généralement de couvrir les droits de
scolarité et le coût du matériel scolaire. En 2016-2017, ce montant
sera de 4 678 $ pour 30 crédits ». Aussi, « les étudiants de la classe
moyenne se verront accorder un prêt additionnel de 2 850 $ ». Donc,
« ces deux mesures permettront d’accorder annuellement des prêts
additionnels à plus de 50 000 étudiants. »
En sommes, plus d’étudiants s’endetteront et leurs dettes finales seront plus élevées.
Pour bien comprendre ce qu’il en est, il faut se référer aux excellentes recherches de l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS), en particulier les travaux d’Eric Martin et de Simon Tremblay-Pépin. Eric Martin explique bien sur son blogue de l’IRIS comment le RPR est une mesure dangereuse. Il cite l’économiste Claude Montmarquette, une référence privilégiée du gouvernement Charest :
« Un autre avantage est que le système RPR permet d’accroître les montants de prêts ou l’endettement des étudiants.
En d’autres termes, si une contribution financière supérieure est
demandée aux étudiants, le RPR est le système qui facilite cette
décision. Soulignons que le RPR n’entraîne pas une hausse des frais de
scolarité, mais le RPR est la meilleure façon d’y faire face sans
compromettre l’accessibilité aux études. »
Monsieur Martin cite également avec justesse le Comité consultatif sur l’accessibilité financière aux études :
« L’expérience étrangère montre que la mise en place d’un système RPR est souvent couplée à une hausse des frais de scolarité.
Claude Montmarquette (rencontre du 17 octobre 2001 avec le CCAFE)
pense, d’une part, que la hausse des frais de scolarité québécois est
incontournable et que, dans ce cas, le système RPR est la meilleure
forme qui soit pour en faciliter le remboursement. Il est simple de
retourner l’argument : si le RPR assure une grande flexibilité de
remboursement des emprunts et comme les syndicats étudiants sont
favorables à l’implantation de ce système, il n’existe plus aucune barrière à l’augmentation des frais de scolarité une fois que le RPR est mis en place. »
En somme, Eric Martin décrit bien ce que
représente véritablement le RPR et il voit juste lorsqu’il écrit que
« le RPR est loin d’être une mesure d’aide aux étudiants. Il s’agit d’un
morceau essentiel d’un nouveau dispositif de financement qui repose sur
l’augmentation de l’endettement étudiant ». On peut citer l’Angleterre
en exemple qui, après avoir instaurer le RPR, a procéder à plusieurs
augmentations des frais de scolarités au détriment des étudiants
britanniques qui ont vu leur endettement exploser.
L’IRIS a également publié le 8 mai 2011,
une excellente recherche sur l’augmentation des droits de scolarité.
Dans cette étude, intitulée « Faut-il vraiment augmenter les frais de scolarité?
Huit arguments trompeurs sur la hausse », les chercheurs Eric Martin et
Simon Tremblay-Pépin détruisent un à un les arguments du gouvernement
Charest. En voici quelques-uns :
1- Le gouvernement affirme que les universités sont sous-financées alors qu’elles souffrent plutôt d’un malfinancement, c’est-à-dire d’une mauvaise répartition des ressources.
2- Le gouvernement affirme que ce (prétendu) sous-financement menace la qualité de l’éducation et la valeur des diplômes alors
que c’est la nouvelle vocation commerciale (privatisation) des
universités qui réduisent l’éducation à une marchandise plus coûteuse et
moins riche en contenu.
3- Selon le gouvernement, la hausse des droits de scolarité va renflouer les coffres universitaires, mais en fait, il s’agit plutôt d’une transition d’un mode de financement publique à celui d’un financement privé.
4- Le gouvernement soutien qu’en payant plus de droits de scolarité, les étudiants feront leur juste part. En réalité, les
étudiants feront plus que leur juste part, car ces derniers devront
travailler deux fois plus longtemps pour payer leurs études que dans les
années 1970.
5- Le gouvernement ose dire que la hausse n’aura pas d’effet sur la fréquentation universitaire et, pourtant, si
le Québec était conforme à la moyenne canadienne, 30 000 étudiants (qui
sont aux études présentement) n’auraient pas les moyens d’aller à
l’université.
6- En définitive, l’étude de
l’IRIS montre que la gratuité scolaire est relativement peu couteuse et
que son financement public est socialement équitable, alors que le gouvernement ose dire qu’il s’agit d’un projet irréaliste et potentiellement injuste pour la société.
A la lumière de ces informations, nul ne
peut douter que le gouvernement Charest suit un modèle concocté par des
économistes mondialistes qui doivent leur allégeance à des institutions
internationales puissantes et non pas au peuple étudiant québécois. Les
étudiants devront peut-être bientôt s’endetter pour la vie sans avoir
l’assurance d’obtenir un emploi stable et bien rémunéré en cette période
d’incertitude économique qui risque fort de se prolonger.
Le secteur privé se réjouit
Lorsque le gouvernement Charest a annoncé
au début du mois d’avril qu’il bonifiait le programme de prêts et
bourses et qu’il mettait en place le remboursement proportionnel au
revenu, la chambre de commerce de Montréal s’est tout de suite réjouit !
En effet, cette dernière a émis un communiqué de presse
dans lequel son président, Michel Leblanc, a félicité « la ministre de
l’Éducation et le ministre des Finances d’avoir pris cette décision
éclairée qui vient consolider l’accessibilité aux études supérieures ».
C’est sûr que monsieur Leblanc était content car, comme il le dit dans
le communiqué, « La Chambre proposait la mise en place d’un tel
mécanisme en 2010 dans le Pacte pour un financement concurrentiel de nos universités ». C’est ce document, le Pacte pour un financement concurrentiel de nos universités,
qui est derrière la décision du gouvernement de réformer le financement
de l’éducation au Québec. Ce document a été signé par les individus
suivants :
M. Michel Audet, ex-ministre des Finances du Québec
Me Lucien Bouchard, ex-premier ministre du Québec
M. Joseph Facal, ex-président du Conseil du trésor
Mme Monique Jérôme-Forget, ex-ministre des Finances du Québec et ex-présidente du Conseil du trésor.
Mme Françoise Bertrand, présidente-directrice générale de la Fédération des chambres de commerce du Québec
M. Yves-Thomas Dorval, président du Conseil du patronat du Québec
M. Michel Leblanc, président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.
Mme Julie Bouchard, ex-présidente de la
Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) et de la Fédération des
associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal (FAÉCUM
M. Youri Chassin, ex-président de la
Fédération étudiante de l’Université de Sherbrooke (FEUS),
ex-vice-président aux Affaires universitaires de la Fédération étudiante
universitaire du Québec (FEUQ) et ex-membre du Conseil permanent de la
jeunesse
M. Hugo Jolette, ex-président de
l’Association générale étudiante de l’Université du Québec en
Abitibi-Témiscamingue (AGEUQAT) et ex-trésorier de la Fédération
étudiante universitaire du Québec (FEUQ)
M. Patrick Lebel, ex-président de la
Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de
Montréal (FAÉCUM) et du Conseil permanent de la jeunesse.
Étrangement, ce sont ces mêmes signataires qui publiaient le 2 mai dernier une lettre
dans les quotidiens québécois dans lequel ils ont osé écrire : « Il est
plus que temps de se ressaisir : il faut rétablir l’ordre, les
étudiants doivent retourner en classe et tous les efforts doivent être
déployés pour sauver une session déjà terriblement compromise. Voici une
situation où, au-delà de toute allégeance politique, la population doit
donner son appui à l’État, ultime responsable de la paix publique, de
la sécurité des personnes et de l’intégrité de nos institutions. »
Oui, le secteur privé se réjouit…, mais pas trop en ce moment.
Des arguments mondialistes
Selon l’aveu même du gouvernement
Charest, la hausse des droits de scolarité est mise en place dans le but
de permettre aux universités québécoises d’atteindre un niveau de
« classe mondiale ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Martin Lavallée,
candidat à la maîtrise en histoire à l’UQAM, l’explique bien dans un article publié le 1er mai
dernier dans le Huffington Post. Il explique que, selon la Banque
mondiale, une université de calibre mondial en est une qui produit du
« capital humain » destiné à un marché du savoir international au
service de l’entreprise privée (les multinationales). Monsieur Lavallée
pose la bonne question : « La question est de savoir si les étudiants
québécois sont prêts à payer davantage uniquement pour que leurs
universités soient reconnues internationalement par une minorité
d’individus se basant sur les critères d’un marché mondial néolibéral et
pour répondre aux besoins des entreprises privées. Dans le débat actuel
sur la hausse des droits de scolarité, cet enjeu fondamental mérite
d’être davantage discuté. »
Comme je l’ai mentionné au début de cet
article, la privatisation du financement de l’éducation (et du système
en général) n’est pas une idée québécoise mais mondialiste. Monsieur
Lavallée est visiblement d’accord avec ce constat facile à faire et il
conclue son article ainsi : « Le problème qui se pose lorsqu’on veut
connaître le bien-fondé de la hausse des droits de scolarité, c’est de
savoir si la population québécoise est en accord avec l’orientation
donnée à sa société et à son système d’éducation par notre gouvernement,
orientation qui n’émane visiblement pas d’elle, mais plutôt d’une élite
mondialisée qui poursuit ses propres objectifs. »
Conclusion
La privatisation mondiale de l’éducation
est un fait. C’est un processus qui arrivera bientôt à son aboutissement
si rien n’est fait pour l’arrêter. Cette privatisation est commandée
par une élite mondialiste qui opère sur toutes les facettes de la vie
humaine. Une énorme majorité des gouvernements du monde entier sont
infiltrés, voire dominés par des agents de cette élite mondialiste ; de
plus, les institutions mondialistes comme le FMI, la Banque mondiale,
l’OCDE et de nombreux think tanks travaillent au-dessus des
gouvernements et dictent la marche à suivre.
Il est temps pour le peuple québécois de
prendre en main l’avenir de l’éducation au Québec et de l’arracher des
griffes du secteur privé qui ne travaille que pour ses propres intérêts
et que pour ceux d’une élite impitoyable assise confortablement tout en
haut de la pyramide planétaire. Ceci nécessitera probablement la
création d’un nouveau pays libre du mondialisme, le pays du Québec.
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