jeudi 26 novembre 2009

Congrès de Québec Solidaire


LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC: MOYEN OU BUT?

Bureau de People’s Voice au Québec

«Assez de défaitisme et de petits pas, remobilisons les Québécoises et les Québécois autour de l'indépendance» est devenu le slogan final à l’issue du dernier congrès d’orientation politique de Québec Solidaire à Laval, qui s'est tenue à la fin de novembre après plusieurs mois de débat. La déclaration illustre un cheminement du nouveau parti politique de gauche vers une position clairement séparatiste à propos de la question nationale.

Jusqu'à ce congrès, Québec Solidaire était un parti unifié de la gauche qui intégrait différentes perspectives sur la question des relations du Québec avec le Canada. « Avant, on voyait le projet de souveraineté comme un outil secondaire pour réaliser un programme social et environnemental », a dit à People's Voice Pierre Fontaine, président du Parti communiste du Québec. « De moyen, la souveraineté est devenue un but en soi. »

Québec Solidaire a été formé en 2006 de la fusion d'Option citoyenne et de l'Union des forces progressistes (un parti fédéré dont faisait partie le Parti communiste). Depuis la percée victorieuse d’Amir Khadir comme candidat de QS dans la circonscription montréalaise de Mercier, lors de l’élection provinciale de novembre 2008, il y a eu une pression de plus en plus forte pour que soit adoptée une position plus nationaliste.

« La porte est désormais ouverte à des compromis avec les forces nationalistes bourgeoises - comme le Parti québécois (PQ) », a dit Fontaine. Certaines propositions au cours du débat avançaient l’idée d’un front uni pour l'indépendance nationale avec des groupes comme la Société Saint-Jean-Baptiste, les syndicats, les étudiants, les écologistes, les féministes, et « les partis souverainistes».

« M. Jacques Parizeau parle de l'absolue nécessité de renouveler le discours sur la souveraineté. À Québec solidaire, nous sommes totalement d'accord. Au fil des ans, le discours sur l'indépendance a été vidé de son sens par certains souverainistes qui ont voulu faire du Québec un pays sans projet (de justice sociale) », a déclaré dans un communiqué aux médias la présidente et porte-parole de Québec solidaire, Françoise David.

Cette position, cependant, va aliéner à QS le soutien de progressistes qui ne considèrent pas la séparation comme la question principale aujourd'hui. La proposition a suscité l’opposition de différents orateurs sur le plancher du congrès. Arthur Sandborn, ancien dirigeant de la Confédération des syndicats nationaux (Conseil central de Montréal) a annoncé sa démission dès que la résolution finale fut adoptée.

«En fait, la prétention que le fédéralisme canadien ne peut être réformé présume que la bourgeoisie sera toujours au pouvoir et que les conditions politiques actuelles ne changeront jamais», a souligné Pierre Fontaine. «Le changement n’est vu possible qu’au Québec, parce qu’il y existe un mouvement bourgeois en faveur de la souveraineté. La question d’une transformation sociale fondamentale n’est donc pas réellement posée.»

« Ceux qui sont responsables de l'oppression nationale au Canada sont la classe dirigeante et le système capitaliste », a souligné Pierre Fontaine. «Les communistes défendent, au sein de la classe ouvrière, le droit à l'autodétermination, y compris le droit de séparation, afin de promouvoir l'unité des travailleuses et des travailleurs et de leurs alliés contre leur ennemi commun.»

Fontaine a souligné la proposition de longue date du Parti communiste à l’effet que ces droits doivent être inscrits dans une nouvelle constitution, démocratique et égalitaire pour toutes les nations au Canada. « Cela est nécessairement liée à la lutte pour le socialisme.»

Les doléances et le mécontentement du Québec sont de nouveau en discussion suite à l’arrêt de la Cour suprême d’Octobre dernier annulant le projet de loi 104, sur la question controversée du choix de l'école où les parents, en particulier les parents immigrés, peuvent envoyer leurs enfants.

Étant donné les avantages de parler anglais au Québec, comme par exemple pour obtenir des salaires plus élevés et une meilleure qualité de vie, les communautés d'immigrants ont depuis longtemps opté pour envoyer leurs enfants dans des écoles anglophones, intégrant ainsi la minorité canadienne-anglaise plutôt que la majorité francophone. En réponse à cette pression sur la langue française, le PQ adopta une législation limitant l'accès aux écoles de langue anglaise.

La Charte québécoise de la langue française dit que les enfants doivent recevoir, sans exception, l’enseignement en français. L'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés stipule toutefois que « les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit son instruction, au niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au Canada ont le droit de faire instruire tous leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue de cette instruction dans cette province ».

« Le problème est que vous avez une égalité formelle appliquée à une réalité inéquitable entre les deux langues », a souligné Pierre Fontaine. «Si ça ne tenait qu'à la Constitution canadienne, la langue française serait condamnée à disparaître progressivement.»

Avant que la loi 104 ne fusse adoptée, de nombreux parents envoyaient leurs enfants à l'école anglaise privée (non subventionnée par le ministère de l'Éducation) pour une courte période afin de pouvoir revendiquer le droit constitutionnel à l'éducation en anglais. Les sœurs, les frères et les possibles descendants d'un étudiant qui avait ainsi obtenu le droit à une éducation en anglais pouvaient, à leur tour, aller légalement à une école anglaise au Québec.

Cette lacune avait soulevé un tollé général, car elle permettait aux immigrants de contourner la loi. La loi 104 avait fermé la brèche, la décision de la Cour suprême l'a ouverte à nouveau. Cette situation inquiète vivement les Québécoises et les Québécois. Plusieurs centaines de nationalistes et de syndicalistes ont organisé un rassemblement contre la décision quelques jours après qu'elle eut lieu.

«La nation québécoise doit avoir le droit de défendre la langue française», a souligné Pierre Fontaine. «C'est un autre exemple de l'échec de la Constitution canadienne à reconnaître le droit du Québec à l'autodétermination».

mercredi 25 novembre 2009

Honduras, Colombie, Cuba : les États-Unis s'en tiennent à la doctrine Monroe

Entrevue d’Arnold August à l’émission Le monde cette semaine, animée par André Pesant sur les ondes de CIBL Radio-Montréal, le 22 novembre 2009

Par Karine Walsh*

Le 25 novembre 2009

Alors que le gouvernement étasunien multiplie ses interventions belliqueuses au sud du continent, André Pesant rappelle les origines idéologiques de la politique étrangère étasunienne dans une chronique intitulée Honduras, Colombie, Cuba - les États-Unis s'en tiennent à la doctrine Monroe: toute l'Amérique aux Nord-américains. C’est dans un discours à l’intention des Européens prononcé le 2 décembre 1823, que le président américain républicain James Monroe allait fixer les directives que devait adopter la diplomatie des États-Unis au XIXe et au début du XXe siècle.

Dans le même ordre d’idée, Pesant rappelle le concept d’un proverbe africain emprunté par Roosevelt en 1901 : « Parle doucement et porte un gros bâton». Roosevelt a employé pour la première fois cette expression au Minnesota State Fair, le 2 septembre 1901, douze jours avant que l'assassinat du président William McKinley ne le propulse à la présidence des États-Unis. Cette doctrine du big stick visait à faire assumer aux États-Unis une place de véritable police internationale, en protégeant ses intérêts en Amérique latine, principalement dans la zone des Caraïbes, et cela en ayant recours à des représailles militaires lorsque jugées nécessaires.

L’animateur constate qu’un siècle après cette affirmation, la même politique du big stick semble toujours en vigueur à une semaine de l’élection présidentielle boycottée par la grande majorité au Honduras : « Pendant que l'impérialisme nord-américain proposait à grand renfort de publicité un marché de dupes au président Zelaya, il prenait le contrôle militaire de la Colombie ». Faisant contraste au silence complice des médias traditionnels de la dite communauté internationale, Pesant souligne « la voix bien vivante de Fidel Castro », faisant ainsi allusion aux récentes réflexions de celui-ci, publiées sur plusieurs sites Internet : « L’annexion de la Colombie aux États-Unis » en date du 6 novembre et « La révolution Bolivarienne et la paix » en date du 18 novembre.

L’invité de Pesant dans le cadre de cette chronique était Arnold August, un journaliste, conférencier, auteur de plusieurs articles sur le coup d'État au Honduras publiés dans des sites Internet alternatifs prestigieux et spécialiste en démocratie participative cubaine. Selon lui c’est effectivement une politique étasunienne agressive qui perdure depuis deux siècles vis-à-vis l’Amérique latine. « Cette politique de contrôle de l’Amérique latine a commencé tout de suite après la guerre d’indépendance des États-Unis de 1787. Même avant le discours de James Monroe en 1823, qui allait définir la ligne de conduite de son pays en matière de politique étrangère, Thomas Jefferson, dès 1807 a déclaré voir en Cuba l’acquisition la plus intéressante pour les États-Unis. Cette politique de contrôle s’applique à toute l’Amérique latine; les visages et les partis au pouvoir changent de temps en temps à la Maison Blanche, mais la politique est demeurée la même. »

Pesant rappelle aux auditeurs la sombre réalité de l’histoire étasunienne, l’hérédité historique de la classe dirigeante nord-américaine, une classe esclavagiste qui a bâti sa richesse avec l’importation et l’exploitation éhontée d’esclaves africains. « L’histoire des États-Unis en est une de pillage des ressources naturelles aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur, incluant l’extermination des populations autochtones,» a-t-il souligné. En ce qui concerne le Honduras, Pesant remet en contexte la politique étasunienne agressive de domination du continent américain appliquée depuis deux siècles à la lumière des évènements actuels, avec d’une part la négociation d’un marché de dupe imposée à Zelaya et d’autre part, l’installation de 7 bases militaires étasunienne en Colombie.

August rappelle alors un des facteurs qui ont menés au coup d’État du 28 juin dernier, c’est-à-dire la décision de Zelaya, avec l’appui du peuple hondurien, de joindre l’Alliance Bolivarienne pour les Amériques. Selon August, cette décision importante est directement liée au coup d’État au Honduras ainsi qu’à l’installation de base militaires en Colombie. « L’ALBA fut établi il y a 5 ans, en premier lieu par le Venezuela et par Cuba. Il y a eu depuis un effet de vague du mouvement et d’autres pays sont maintenant membres : le Nicaragua, la Bolivie, l’Équateur, Antigua-et-Barbuda, la Dominique, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, le Honduras et bientôt le Paraguay, pour terminer avec 10 pays, ce qui n’est pas négligeable. Le fait que le Honduras ait pris la décision de se joindre à l’ALBA, dont les pays membres rejettent la domination politique, économique et militaire étasunienne, fut un affront aux États-Unis que ceux-ci n’ont pas accepté. Le coup d’État contre Zelaya n’était pas une offensive seulement dirigée contre le Honduras, mais contre tous les pays de l’ALBA et même contre tous les pays d’Amérique du Sud. »

Pesant interroge son invité concernant le qualitatif militaire que l’on se garde bien aux États-Unis, dans les milieux dirigeants aussi bien que dans la presse en général, d’associer au coup d’État du 28 juin dernier. August, qui a rédigé quelques articles à ce sujet, en l’occurrence celui intitulé Des points de vue constants de part et d’autre qui convergent vers une seule solution : l’Assemblée constituante, explique l’importance considérable que revêt l’omission du mot militaire :

« Il existe une loi aux États-Unis, plus précisément la section 7008 de la loi sur les budgets, clairement intitulée Coups d’État militaires, qui interdit que des fonds soient engagés ou dépensés pour financer le gouvernement d’un pays où le chef dûment élu a été renversé par un coup d’État militaire ou un décret. En s’abstenant de qualifier officiellement le coup d’État comme étant militaire, Washington se permet de maintenir la porte ouverte pour la tenue des élections du 29 novembre prochain, même si Zelaya n’est pas de retour au pouvoir. La Maison- Blanche se donne aussi le luxe de cultiver le doute planant au-dessus de la tête de Zelaya, quant à ses activités au plan juridique et constitutionnel qui ont conduit au coup d’État. Quoi qu’il en soit, le processus électoral s’annonce pour être un désastre autant pour la clique putschiste que pour l’administration étasunienne».

Faisant référence à un article d’August publié récemment, Pesant a évoqué un communiqué de presse en date du 17 novembre émis par Harris Corporation, qui vient confirmer que Washington est loin de réduire ses efforts de répression et de contrôle de la résistance hondurienne. Effectivement, August souligne que cette entreprise internationale en matière de communications et de technologies de l’information, s’est vu attribuer les opérations de commandement, de contrôle, de communications, de systèmes informatiques et de programme d’entretien du commandement du sud des États-Unis, le SouthCom, pour la force opérationnelle inter-armée Bravo, c’est-à-dire la base aérienne de Soto Cano au Honduras.

August a conclue l’entretien en soulignant la corrélation entre les évènements récents en Amérique latine, y compris l’établissement des bases militaires yankees en Colombie : « On doit souligner tout d’abord que la Colombie partage ses frontières avec le Venezuela et l’Équateur, deux autres pays qui bâtissent un système social alternatif et rejettent fermement le néolibéralisme. Rafael Correa, tel que promis lors de son élection, a annoncé récemment la fermeture de la seule base militaire étasunienne sur le territoire d’Équateur, une initiative que Zelaya envisageait au Honduras également. Non loin de là en Bolivie, Evo Morales prend également des positions très pondérées, justes et fortes contre la domination étasunienne sur le continent. On ne peut détacher ces évènements : le coup d’État militaire au Honduras et l’établissement de 7 bases militaires étasuniennes en Colombie. J’ai appris ce matin que hier, Micheletti a annoncé clairement que toute personne appelant au boycott des élections au Honduras risque de se ramasser en prison et que le peuple hondurien subit actuellement une augmentation de la répression. » Au bilan de la panoplie d’actes d’agression contre les peuples, August a rappelé le maintient du blocus étasunien contre Cuba, qui prolonge depuis 50 ans la souffrance du peuple cubain en dépit de sa condamnation à l’ONU par une écrasante majorité d’États membres. La base navale de Guantanamo sur le territoire de l’île est également occupée par les forces armées étasuniennes, et cela en toute illégalité depuis plus d’un siècle, alors que Cuba était en tête des visées annexionnistes des États-Unis.

August a terminé en invitant les auditeurs à assister à une conférence prévue pour le vendredi 27 novembre à l’Université du Québec à Montréal à 18h00, 400 Ste-Catherine Est, salle A-M050. Les dangers que représente l’installation de bases militaires additionnelles dans la région y seront exposés.

*Karine Walsh est une militante pour la justice sociale et co-animatrice de l’émission Dimension Cubaine, de la Table de concertation de solidarité Québec-Cuba, à Radio Centre-Ville à Montréal (Québec).

lundi 2 novembre 2009

Lecture

Tiré de VOLTAIRE:
« Alors que les Honduriens ne passaient pas spécialement pour être très politisés, et que les experts US ne prévoyaient pas de réaction durable au coup d’État, c’est l’inverse qui s’est produit. La population s’est soudain engagée, a rejoint des organisations militantes, et s’est dressée contre les putschistes. Pour Arnold August, ce phénomène n’est pas sans rappeler les mouvements populaires qui ont agité les États de la région au cours de la décennie et ont tous porté au pouvoir des leaders révolutionnaires. Selon lui, si rien ne vient entraver cette mobilisation, le recul des putschistes est inéluctable. En tout état de cause, une fois de plus, l’interventionnisme US se retourne contre Washington. »
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