vendredi 13 juin 2008

Article de JM, juin 2008



Le Proche-Orient pour les nuls

Bernard Langlois

“ Depuis près de six ans, le gouvernement israélien tue par semaine entre 10 et 20 Palestiniens, enlève les hommes et les femmes par dizaines, détruit les habitations, les champs et les infra-structures, enferme et empêche les habitants de Gaza et de Cisjordanie de circuler librement chez eux. Alors, quand un groupe de résistants, "terroristes" pour les Israéliens, "activistes" pour les autres, capture un soldat chargé de surveiller la grande prison à ciel ouvert qu’est Gaza, l’Occident, l’Europe, la France et sa presse indépendante trouvent que c’en est trop pour Israël. Cet État "seule démocratie au Proche-Orient" est également le seul État à avoir le droit de tuer des civils, d’enlever des ministres et des députés élus démocratiquement, dans un pays en lambeaux, seule démocratie sous occupation dans le monde.

Il y a quelque chose d’irréel dans ce monde libre voulu par Bush et Blair. On se frotte les yeux et on tend les oreilles pour réaliser que c’est bien la réalité. Celle des bombes puissantes qui pulvé-risent les réfugiés libanais sur la route de l’exode. Celle d’une télévision qui choisit de ne pas montrer ce qu’on ne doit pas voir. On se dit alors, que nous n’avons rien compris. Le malaise qu’on éprouve devant notre poste de télévision vient de notre incapacité à comprendre les nouvelles règles du jeu. [...]

Les 11 règles du journalisme
Voici, en exclusivité, ces règles que tout le monde doit avoir à l’esprit lorsqu’il regarde le JT le soir, ou quand il lit son journal le matin. Tout deviendra simple.

Règle numéro 1 : Au Proche-Orient, ce sont toujours les Arabes qui attaquent les premiers, et c’est toujours Israël qui se défend. Cela s’appelle des représailles.
Règle numéro 2 : Les Arabes, Palestiniens ou Libanais n’ont pas le droit de tuer des civils de l’autre camp. Cela s’appelle du terrorisme.
Règle numéro 3 : Israël a le droit de tuer les civils arabes. Cela s’appelle de la légitime défense.
Règle numéro 4 : Quand Israël tue trop de civils, les puissances occidentales l’appellent à la retenue. Cela s’appelle la réaction de la communauté internationale.
Règle numéro 5 : Les Palestiniens et les Libanais n’ont pas le droit de capturer des militaires israéliens, même si leur nombre est très limité et ne dépasse pas trois soldats.
Règle numéro 6 : Les Israéliens ont le droit d’enlever autant de Palestiniens qu’ils le souhaitent (environ 10 000 prisonniers à ce jour, dont près de 300 enfants). Il n’y a aucune limite et ils n’ont besoin d’apporter aucune preuve de la culpabilité des personnes enlevées. Il suffit juste de dire le mot magique "terroriste".
Règle numéro 7 : Quand vous dites "Hezbollah", il faut toujours rajouter l’expression "soutenu par la Syrie et l’Iran".
Règle numéro 8 : Quand vous dites "Israël", il ne faut surtout pas rajouter après : "soutenu par les États-Unis, la France et l’Europe", car on pourrait croire qu’il s’agit d’un conflit déséquilibré.
Règle numéro 9 : Ne jamais parler de "Territoires occupés", ni de résolutions de l’ONU, ni de violations du droit international, ni des conventions de Genève. Cela risque de perturber le télé-spectateur et l’auditeur de France Info.
Règle numéro 10 : Les Israéliens parlent mieux le français que les Arabes. C’est ce qui explique qu’on leur donne, ainsi qu’à leurs partisans, aussi souvent que possible la parole. Ainsi, ils peuvent nous expliquer les règles précédentes (de 1 à 9). Cela s’appelle de la neutralité journalistique.
Règle numéro 11 : Si vous n’êtes pas d’accord avec ces règles ou si vous trouvez qu’elles favorisent une partie dans le conflit contre une autre, c’est que vous êtes un "dangereux antisémite".”

Source de l'article : http://www.michelcollon.info/articles.php?dateaccess=2008-04-26%2006:25:23&log=attentionm

FLASH

Le projet de loi C-50 est passé à majorité à la chambre des communes lundi le 9 juin. Ce projet de loi vise à modifier la loi sur l’immigration en donnant plus de pouvoir au ministre. En faite, celui-ci pourra maintenant accélérer le processus d’immigration pour les personnes qui ont des métiers dont le «Canada a besoin» et rejeter ceux qui sont «moins profitables». En gros, les personnes non-qualifiées, plus souvent des femmes dans ce cas, ou les handicapés, les pauvres, les personnes les moins éduquées, les enfants et les personnes âgées verront réduites leurs chances d’être accepter au Canada. C’est simple, cette loi vient soumettre aux exigences du marché les demandes d‘immigration. Et à moins d’un revirement spectaculaire au Sénat, cette loi sera très bientôt en vigueur.

Le projet de loi C-10 est un autre projet de loi du gouvernement Harper. Celui-ci permet rien de moins que la censure par le ministère du patrimoine. C’est que désormais, les oeuvres télévisuelles jugées troublant «l’ordre public» pourront se voir couper leur financement. De plus, les oeuvres jugées rétrospectivement comme subversives devront, selon la discrétion de la ministre, rembourser leurs crédits d’impôt. Le milieu artistique se bat farouchement contre cette loi et crie à la censure.

Le Rhizome, un lieu d’habitation communautaire, à été attaqué 3 fois durant la nuit en début avril. Les vitres ont été fracassées et des projectiles ont été lancés à l’intérieur de la résidence. Personne ne connaît la véritable identité des attaquants. Mais beaucoup soupçonnent des groupes racistes du quartier Hochelaga-Maisonneuve. En effet, le groupe Antifa avait largement affiché contre les groupes néonazis du quartier et ceux-ci avaient promis de se venger. Le Rhizome étant un lieu connu pour des rassemblements de l’extrême-gauche anticapitaliste, beaucoup pensent que l’endroit à servit la vengeance. Dans la même période, une voiture appartenant à un homosexuel à été brûlé et d’autres actions du genre, mais avec moins d’envergure cette fois, ont été portées contre des minorités et des gens de la gauche.

Mercredi le 11 juin, un piquetage était organisé par Échec à la guerre contre la venue de Henry Kissinger à Montréal. Il était invité à faire une conférence au Forum économique international des Amériques - une des nombreuses réunions closes où gens d’affaire et politiciens se rencontre pour décider de notre sort.- Cet homme est un ancien Conseillé à la sécurité nationale aux États-Unis. Il est demandé à comparaître dans plusieurs pays pour son rôle dans certains crimes de guerre. Voici une chronologie faite par Échec à la guerre à son propos :

«1970 - Alors que l'humiliation des États-Unis s'amplifiait dans l'invasion désastreuse du Viêt-Nam, Kissinger a organisé des bombardements secrets au Cambodge dans le but d'étendre la guerre
à ce pays.

1971 - Il a donné son approbation tacite aux militaires pakistanais pour le meurtre de centaines de milliers de civils dans l'est du pays.

1973 - Il a dirigé l'implication étasunienne dans l'Opération « Condor »au Chili en donnant des ordres appuyant le coup d'État mené par le Général Pinochet contre le gouvernement démocratiquement élu du Président Salvador Allende. Le coup a mené à la persécution, la
disparition, la torture et l'assassinat de plusieurs milliers de personnes.

1975 - Il a approuvé et appuyé l'invasion du Timor Oriental par le Général Suharto d'Indonésie, ce qui a entraîné la mort de plus de 200 000 personnes.»

La Cour d'Appel d'Atlanta à rejetée la demande d’appel des Cinq Cubains injustement emprisonnés aux États-Unis. Ceux-ci demandent un nouveau procès puisque le premier qui avait lieu à Miami - où sont les groupes d’extrême droite anti-cubain dénoncés par les Cinq - avait été extrêmement partial et injuste. Par exemple, les Cinq Cubains n’avaient pas eu accès à une grosse partie de la preuve contre eux et beaucoup de personnes ont été empêchées de témoigner. Le vendredi 6 juin, de 17 à 18 heures, environ 40 personnes ont donc manifesté devant le Consulat des États-Unis à Montréal afin de dénoncer cette décision. Cette manifestation était organisée par la Table de concertation de solidarité Québec-Cuba et son Comité Fabio Di Celmo pour les 5. Des manifestions semblables appelées d’urgence ont eu lieu un peu partout au pays.

Le projet de loi C-484 - Loi sur les enfants non encore nés victimes d’actes criminels -continue à rencontrer la résistance des milieux progressistes et féministes. La criminalisation de la mort d’enfants non encore nés est une porte grande ouverte à la criminalisation de l’avortement. Les libéraux, comme dans le cas des autres projets de lois honteux du gouvernement Harper énoncés plus haut, se disent contre celui-ci mais s’abstiennent de voter, ne trouvant pas favorable ce temps de l’année pour des élections. Leur couardise coûtera peut-être une des plus importantes avancées pour les femmes avec le droit de vote.

L’idée de la nationalisation de l’industrie pétrolière fait son bout de chemin dans les esprits avec les hausses folles que nous connaissons. Nous nous souvenons que des citoyens et citoyennes à Montréal et ailleurs au Québec avaient tenté un boycott, mais la participation avait été faible. Boycotter cette industrie n’est pas possible pour tout le monde et ne règle pas le problème de fond. Mais récemment, le Congrès du travail du Canada - le plus grand syndicat au Canada - annonçait être favorable à la nationalisation de cette ressource. Léo-Paul Lauzon, intellectuel québécois, clamait déjà depuis un certain temps que la nationalisation était essentielle. Et les récentes annonces au Québec de la collusion entre Ultramar et de nombreux détaillants pour hausser encore plus les prix de l’essence ne fait qu’ajouté à la nécessité d’une telle mesure.

Le 15 mars à ce tenait à Montréal une marche pour la Paix qui exigeait le retrait des troupes canadiennes en Afghanistan, mais qui exigeait aussi la fin de la guerre en Irak. Trois autres grandes revendications formaient le coeur de l’action : Non à la prolongation de la mission en Afghanistan, Oui à une politique étrangère respectueuse du droit international, et notamment du droit des peuples à l‘autodétermination -soit s‘opposer à l‘ingérence de l‘occident en Orient- et que les dépenses militaires servent plutôt à répondre aux besoins économiques et sociaux de la population.

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Les Flashs vous ont donné envi d'en savoir un peu plus? Voici quelques liens pour vous rassasier.

Organisations :

La Table de concertation de solidarité Québec-Cuba : http://www.solidaritequebeccuba.qc.ca
Écfhec à la Guerre : http://www.aqoci.qc.ca/ceg/
Congrès du travail du Canada : http://congresdutravail.ca
Le Rhizome : http://lerhizome.blogspot.com/

Sujets :

Henry Kissinger : http://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_Kissinger
Nationalisation du pétrole : http://www.ameriquebec.net/2006/11/02-la-nationalisation-du-petrole-canadien-un-debat-silencieux.html
Guerre en Afghanistan : http://yclljc-magazine.blogspot.com/2008/04/article-francophone-parue-dans-le-rebel.html
Projet de loi C-10 : http://www.radio-canada.ca/arts-spectacles/cinema/2008/03/03/003-loi-c-10-refus.asp
Projet de loi C-484 : http://www.vigile.net/-C-484-et-le-droit-a-l-avortement-
Projet de loi C-50 : http://pccpcq.blogspot.com/2008/05/toute-personne-assez-bonne-pour.html
Les Cinq Cubains : http://www.freeforfive.org/fr/thefive.html

jeudi 12 juin 2008

Article de JM, juin 2008


Quand le message passera-t-il enfin ?
La lutte étudiante continue malgré tout

Par le collectif de Jeunesse Militante, Montréal

Faisons un petit retour sur le mouvement étudiant au Québec. En mars 2007, le gouvernement Charest annonçait officiellement le dégel des frais de scolarité. L’augmentation que les étudiants et étudiantes du Québec subisse encore en ce moment est de 50$ par session durant cinq années, soit un total de 500$. Cela équivaut à une élévation du coût des études postsecondaires de 30%.

Très vite, nous nous souvenons que les différentes organisations étudiantes se sont prononcées contre le dégel des frais de scolarité, sans qu’un front commun se soit créé. Malheureusement, le plan d’action lancé par l’ASSÉ culminant par une grève générale illimitée ne passa pas dans les différents établissements scolaires. Pour certains, la cause de ce rejet était circonstancielle. Pour d’autres, la cause avait des racines plus profondes. Les luttes sociales n’ont plus la cote et notre société prend le virage néolibéral de son plein gré. Sans compter que le mouvement étudiant était dangereusement fractionné. Les Fédérations étudiantes, quant à elles, avaient plutôt opté pour quelques manifestations et des événements médiatiques.

D’autre part, en ce qui concerne l’ASSÉ, les revendications allaient bien au-delà du gel des frais de scolarité. On demandait la gratuité scolaire. On nous disait que ce n’était pas suffisant d’être sur la défensive, il fallait attaquer. C’est d’ailleurs sur cette question que les Fédérations et l’ASSÉ se sont divisées.

C’est pourquoi immédiatement après le refus de la grève générale illimitée par la masse étudiante, l’ASSÉ en lança un nouveau. Cette fois, c’était trois jours de grève qui étaient proposés et une manifestation nationale le 15 novembre.

Ce plan d’action fut adopté majoritairement dans les CEGEPs et les Universités. À l’UQAM, où le plan de redressement financier ajoutait à l’urgence de réagir, les associations facultaires avaient demandé à leurs membres plus qu’un mandat de grève de trois jours. Elles avaient obtenu une semaine dans certains cas, une grève illimitée pour d’autres.

Mais les différentes administrations des CEGEPs et Universités ne voyaient pas du même œil l’annonce de la ministre Courchesne. Elles étaient plutôt favorables à de telles mesures. Car actuellement, le système d’éducation québécois souffre d’un manque de financement de près de 400 millions de dollars par années pour les université et de 300 millions de dollars par année pour le réseau des CÉGEPs. Et ce n’est d’ailleurs pas les 500$ de plus par étudiants qui vient combler ce manque-à-gagner. On peut donc se poser la question d’où viendra la part qui manquera encore au financement global de l’éducation ?

Et pour ce qui est de la mobilisation en novembre, elle a fini par une brutale répression policière. Les événements du 13 novembre 2007 au collège du Vieux-Montréal et les différentes occupations avortées à l’UQAM sont les actions les plus connues de cette période mouvementée. La session suivante, une nouvelle vague de mobilisation avait été tentée, mais sans grand résultat.

Il n’y a aucun doute quand au fait que la gratuité scolaire est réalisable. Les recherches qui le prouvent sont nombreuses. Mais face au discours de la gratuité scolaire, les gens posent toujours la question suivante : Comment payer tout ça ? Irrémédiablement, on en arrive à parler des finances de l’État, de taxes aux entreprises, de la guerre en Afghanistan qui coûte si cher au Canada, d’impôts plus élevés, de choix sociaux, etc. C’est donc de dire que la gratuité scolaire va bien au delà de la sphère éducation.

Ce qui fait que le message passe mal dans ces temps ou l’idéologie de droite est appelée lucide. Et du même coup, la réalisation de la gratuité scolaire dépasse largement la responsabilité des étudiant-e-s. Ce projet devrait être celui de tous les regroupements syndicaux, des groupes politiques de gauche et de la classe ouvrière. À défaut d’avoir réussi à faire passer le message, l’ASSÉ commencera l’année scolaire 2008-2009 avec un plan axé contre la privatisation. Voici ce que nous pouvons lire dans le cahier de congrès concernant cette campagne :

« (...)Considérant que l'ingérence du privé a des impacts néfastes sur la vie quotidienne et les conditions matérielles de l'ensemble des étudiants et étudiantes;
(...)Considérant que la privatisation du système d'éducation est la conséquence ultime de son sous financement chronique;
Considérant que le fléau de la privatisation dépasse le simple cadre de l'éducation et s'étend à l'ensemble des services sociaux;
Que la prochaine campagne de l'ASSÉ ait pour thème « Stoppons la privatisation des services sociaux » avec 3 principales revendications :

1. Contre les intérêts et la logique du privé en éducation et dans les autres institutions publiques.
2. Pour un refinancement massif et public des institutions d’éducation post-secondaires
3. Pour la démocratisation des instances dans les institutions post-secondaires.

(..) Que l'ASSÉ travaille conjointement avec l'ensemble des mouvements sociaux afin de mener un front commun contre la privatisation des services sociaux. »

C’est encourageant. Cette campagne a l’avantage de pouvoir unir beaucoup d’organisations en commençant par les syndicats ouvriers qui par exemple, luttent en ce moment contre la privatisation du système de santé. Est-ce que l’ASSÉ aurait compris le message en regard de l’échec de l’année dernière avec l’augmentation des frais de scolarité, et du même coup, avec la gratuité scolaire ?

Car en effet, refuser de faire le front commun avec les fédérations étudiantes en mars 2007 est ce qui a causé la défaite que nous connaissons. On sait que l’ASSÉ avait choisi de refuser cette union pour faire une campagne sur sa revendication première, l’école gratuite. Pourtant, la chose que le gouvernement Charest craint le plus, c’est bien un front commun. Et si cette fois un front étudiant-e-s et ouvrier-ère-s se forme, c’est une bombe lancée contre l’idéologie de droite. Mais avant de rêver à mai 68 ou c’est l’union des ouvrier-ère-s et des étudiant-e-s qui avait permis de faire un bond en avant, c’est quand même l’ASSÉ qui lance cette idée. Et n’ayant pas réussi à faire l’unité dans ses propres rangs, on peut douter de ses capacités. Sans compter qu’il n’est pas dit que les syndicats répondront adéquatement. Le vent de droite affecte aussi leurs membres et ils ont beaucoup de difficulté à se mobiliser, en particulier sur des enjeux plus globaux. Les luttes sociales sont toutes reliées. Mais chaque petit groupe, chaque syndicat, s’occupe seulement de ses problèmes locaux. C’est d’une lutte politique générale dont nous avons besoin, autant pour la communauté étudiante que pour la classe ouvrière.

L’ASSÉ a quand même pris la bonne direction. Et pour ce qui est des Fédérations, elles n’aideront peut-être pas à partir le mouvement, mais si quelque chose se crée, nous pouvons penser qu’elles seront de la partie. Représentant plus de 210 000 étudiant-e-s, c’est quand même une force considérable.

Photographie : Jeunesse Militante / une étudiante manifeste pour la gratuité scolaire

mercredi 11 juin 2008

Article de JM, juin 2008

On ne rigole pas avec l’apartheid israélien

Par Kaoura Farlay

On ne rigole pas avec le Zohan (You Don't Mess with the Zohan) Un film de Dennis Dugan avec Adam Sandler, Jon Turturro, Emmanuelle Chriqui et Rob Schneider

L’histoire est simple. Un agent super doué du Mossad, Zohan Dvir (Adam Sandler), en a assez de sa vie de héros anti-terroriste. Il feint donc sa propre mort lors d'un affrontement avec son pire ennemi, le Fantôme (John Turturro). Il peut ainsi s’envoler pour New York afin de réaliser son rêve, devenir coiffeur. Mais le coiffeur n’est pas si doué. Et pourtant, il a un succès fou auprès de ses dames d’âge mûr. C’est qu’il leur procure un petit extra dans l’arrière boutique, un bang bang comme il le dit.

Au début on s’amuse dans cet Israël et cette Palestine complètement caricaturés. Dans une des scènes, par exemple, le héros reçoit une volée de pierres de jeunes enfants pendant qu’il chasse son ennemi le terroriste. C’est l’Intifada en quelque sorte. Mais le bon Zohan ne tue pas ces pauvres gamins et gamines qui l’attaquent. Il transforme plutôt les pierres lancées en un joujou et les mômes en sont tout impressionnés.

C’était encore drôle. Mais rendu aux États-Unis, les stéréotypes sont poussés jusqu'à un ridicule désolant . Et bien sur, les auteurs, dont Adam Sandler qui a coécrits ce scénario, ne veulent pas trop prendre partie dans le conflit. Mais il faut un vrai méchant comme dans tout bon film américain. Et ce sera donc une caricature d’un bourgeois trop riche, d’une pomme pourrie de la société américaine, qui veut construire un gros centre commercial et ainsi raser les petites entreprises du coin. Contre lui, s’uniront palestiniens et israéliens. Non, je ne féminise pas ces deux groupes, car les seuls combattants dans chaque camp sont des hommes. Les femmes sont reléguées au rang des nombreuses baises du Zohan et des autres mâles protagonistes. Ou encore, par l’entremise de la belle Dalia (Emmanuelle Chriqui), elles seront ces femmes qui ne comprennent rien à la politique mais qui ont la bonne réponse malgré tout, paix et amour. Car oui, les femmes sont toujours douces et gentilles.

Le conflit est dangereusement banalisé. On y suppose que cette guerre qui dure depuis plus de 50 ans est causée par une simple et stupide incompréhension («Car nous nous ressemblons tous...» comme dit le Zohan.) et de la haine injustifiée. «Pourquoi avoir la colère ? » dit-il encore. En se faisant tuer par le héros, un terroriste dit au début du film «tu voles mon pays» et le Zohan répond simplement, «Parce que tu crois que mes ancêtres n'ont pas mis le pied ici avant les tiens ?» Cette phrase sera probablement la seule qui ressemblera a une prise de position. Le reste du film dit un banal faite l’amour, pas la guerre. Les palestinien-ne-s et les israélien-ne-s ne font que se détester sans raison. Il faut faire comme aux États-Unis, terre de la liberté.

D’ailleurs, le rêve américain y est outrageusement vendu. Tous ses pauvres réfugié-e-s de guerre ne veulent qu’une chose, avoir leur petit commerce. Et pour les hommes, se taper plein de nymphettes. Sony en profite pour placer ses produits sans subtilité pendant que Mariah Carey apparaît sans raison en vendant son dernier disque. La méchante guerre créée par les méchants terroristes empêche tout le monde de se réaliser dans la généreuse société capitaliste. Ce n’est certainement pas le capitalisme, plus précisément son stade suprême, l’impérialisme, qui cause ce conflit inhumain.

Si on oublie d’emmener son sens critique avec soi, le film est assez drôle. Oui, on rit dans la salle et moi aussi j’ai rit. Mais le film avançant, une certaine platitude s’installe avec la trop redondante histoire d’amour plate et ô combien prévisible entre le Zohan et sa patronne Dalia. Leur amour permettra, comme on s’en doutait, de réaliser la morale de l’amour pas la guerre.

La seule chose vraiment amusante et avec un peu de bon sens est la caricature de l’extrême droite. Une extrême droite qui aime ses armes à feu, mais qui déteste tout, noir-e-s, jaunes, arabes, juifs, homosexuel-le-s et même les petits chiens. Mais ce qui est intéressant, c’est que c’est cette extrême droite qui sera utilisée pour monter les deux camps un contre l’autre, simulant des attaques des palestiniens contre les juifs et vice-versa. Une extrême droite white power utilisée au profit du méchant capitaliste. Mais ça reste très mince dans le film.

Un film à voir avec une intention anthropologique ou avec un «verre de bière dans le nez». À vous de juger.