mardi 10 octobre 2017

Ara ès hora d’estar alerta!

Adrien Welsh

Au matin du 20 septembre, la Guardia Civil espagnole  fait irruption dans les bureaux et les antennes du gouvernement régional catalan, rappelant les heures les plus sombres de la dictature franquiste. Quatorze responsables du gouvernement sont arrêtés et 9,8 millions de bulletins de vote sont saisis dans la foulée. Le Premier ministre conservateur du Royaume d’Espagne, Mariano Rajoy, qui n’a jamais donné son accord au référendum consultatif de 2014 organisé par le gouvernement catalan d’Artur Mas et a fait savoir d’entrée de jeu qu’il ne reconnaitrait aucun référendum à la suite de l’annonce du chef du gouvernement catalan, Carles Puigdemont, de vouloir organiser un référendum pouvant mener à l’indépendance de la Catalogne en septembre dernier, somme le gouvernement régional catalan de « revenir à la loi et à la démocratie » et ajoute que «le gouvernement [espagnol] fait ce qu’il doit faire et continuera à le faire. » 
 
Lors des semaines et jours suivants, les tensions entre Madrid et Barcelone ne font que s’accentuer. L’intransigeance de Rajoy et du Parti populaire ainsi que le peu d’intérêt manifesté de la plupart des autres partis parlementaires quant à tenter de régler cette question dans un réel cadre démocratique ont attisé les tensions et contribué à populariser les visées indépendantistes du gouvernement Puigdemont auprès des Catalans.

Ces partis tentent en effet de rester dans le cadre légal de la Constitution espagnole de 1978 Ce texte érige l’Espagne en « patrie commune et indivisible de tous les Espagnols » et son article 2 entérine le principe de « l’unité indissoluble de la nation espagnole ». À l’époque de Franco, on aurait simplement ajouté « par la grâce de Dieu »…

Les tensions atteignent leur paroxysme une semaine avant la tenue du référendum. Au cours de cette semaine, les provocations du gouvernement central pour tenter d’empêcher les Catalans de faire usage de leur droit à l’auto-détermination se font plus nombreuses et plus fortes. Dans la foulée, les télécommunications de certains secteurs du gouvernement sont bloquées, 2,5 millions de bulletins de vote sont saisis et plusieurs bureaux de vote sont fermés. Le gouvernement catalan entreprend alors un jeu du chat et de la souris pour organiser le référendum en quasi-clandestinité coute que coute alors que les Catalans prennent la rue. La jeunesse en particulier joue un rôle moteur dans les mobilisations alors que le jeudi précédent le vote, environ 10 000 étudiant.es se mettent en grève et prennent la rue pour revendiquer le droit à la nation catalane de décider de son avenir souverainement, sans intervention étrangère.

Le jour du vote, la Guardia Civil et la police nationale déploient une force démesurée, n’hésitant pas à charger sur la population, protégée par les Mossos D’Esquadra (la police catalane donc recevant ses ordres du gouvernement catalan), et à la bombarder de balles en caoutchouc. Le pouvoir franquiste n’aurait pu faire mieux…

Les affrontements ont été provoquant 800 blessés dont plusieurs blessés « graves » afin d’empêcher que se déroule le vote coute que coute. Mariano Rajoy pousse même la provocation un peu plus loin en affirmant qu’il n’ y aurait jamais eu de référendum sur l’auto-détermination de la Catalogne et que la force déployée aurait été « équilibrée »…
Selon le gouvernement Catalan, le taux de participation se serait situé autour de 43% des inscrits. Malgré tout le déploiement policier, seuls 700 000 personnes n’ont pu voter et 2% des bureaux de vote ont été fermés.

Sans grande surprise, le résultat de la consultation est très largement favorable à l’indépendance. Le oui l’emporte avec 90%, ce qui s’explique notamment par le fait que les partisans au maintien de la Catalogne en Espagne se sont abstenus de voter, suivant ainsi la consigne de Madrid.

L’actuelle crise qui secoue l’Espagne et la Catalogne est plus profonde que ce que tant les nationalistes catalans que la droite conservatrice espagnole tentent de nous présenter. À l’origine de cette crise est une crise générale de la démocratie en Espagne qui remonte à plusieurs décennies.

Si les débuts du nationalisme catalan indépendantiste peuvent être retracés au 19e siècle, il reste que ce mouvement reste plutôt marginal jusqu’aux années post-franquistes où il acquiert un réel caractère de masse et attire certains progressistes : avec la fin de ce qui reste de l’Empire espagnol (notamment avec la fin de la souveraineté espagnole sur le Sahara occidental), les Catalans, qui constituent une nation, ont eux aussi des revendications démocratiques.

Toutefois, le processus de la soi-disant « transition démocratique » en Espagne était ficelé de sorte à ce que les forces populaires au premier rang de la lutte anti-franquiste – en premier lieu le Parti communiste – ne bénéficient d’une place que marginale dans ce processus verrouillé par le Roi, en accord total avec les dernières volontés de Franco. La Constitution adoptée dans la foulée en 1978, à l’inverse de celle du Portugal en 1974, ne consacre que de maigres concessions aux forces démocratiques, notamment en ce qui a trait à la question nationale. Contrairement à l’époque franquiste, un certain effort de décentralisation est concédé de la part du gouvernement central, mais il reste que concrètement, chaque « province autonome » doit négocier une à une les conditions et l’application de cette autonomie avec Madrid. L’existence de nations en Espagne n’est pas reconnue, encore mois leur droit à l’auto-détermination. Il est vrai qu’en 2006, sous le gouvernement de Zapatero, la Catalogne est reconnue brièvement comme nation, une décision invalidée en 2011 par la Cour Suprême.

En plus de la crise de son système « démocratique », l’Espagne a, ces dernières années, été frappée de plein fouet par la crise capitaliste, ce qui fait de ce pays aujourd’hui l’un des plus inégaux d’Europe. De là ressurgissent les vieilles contradictions du capital dans la patrie de Cervantes. L’opposition entre une bourgeoisie agricole et rentière dans la majorité de l’Espagne d’une part et une bourgeoisie catalane fortement industrialisée donc plus libérale et dynamique (la Catalogne représente environ 21% du PIB de l’Espagne et 25% de ses exportations) contribue aussi à la promotion du nationalisme catalan.

En effet, l’idée d’indépendance de la Catalogne n’est pas progressiste en soi. D’ailleurs, l’un des arguments-clé des chefs de file du mouvement indépendantiste consiste à souligner le fardeau fiscal trop important que cette région doit payer à Madrid, ce qui entraverait le développement économique de la bourgeoisie catalane. En outre, il est impossible de voir l’indépendance de cette nation en dehors du cadre plus global. Une catalogne indépendante serait amenée à s’intégrer encore plus au sein de l’Union européenne du Capital et les pressions pour qu’elle en applique les directives seront plus fortes. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les indépendantistes dont Puigdemont se tournent vers l’UE pour agir en tant que médiateur entre Madrid et Barcelone.

Quoi qu’il en soit, les évènements du 1er octobre sont à condamner et à dénoncer fermement par toutes les forces progressistes à travers le monde. En tentant de maintenir l’unité de l’Espagne à coups de matraque et de fusil, le gouvernement de Rajoy a tout simplement violé le principe de base du droit international, le droit des peuples à disposer d’eux-même, à la souveraineté et à l’autodétermination. Honteusement, les gouvernements du Québec et du Canada ont refusé de commenter la crise, et pour cause : l’Acte sur la clarté référendaire leur permettrait d’appliquer le même genre de mesures dans l’éventualité où le Québec – ou toute autre nation – décidait d’organiser un référendum pouvant mener à l’indépendance.

Respecter le droit à l’autodétermination soit du Québec ou de la Catalogne n’équivaut toutefois pas à un appui à l’indépendance. D’ailleurs, dans ces deux nations opprimées au sein d’un État multi-national, les communistes ne favorisent pas cette option, qui, compte tenu que ces deux nations, bien que plus petites, ne représentent pas des colonies. En conséquence, l’unité des travailleur.euses prime sur l’unité nationale. Dans ces deux nations, les communistes refusent tout projet qui proposerait une unité entre le prolétariat et la bourgeoisie monopoliste, mais comprennent aussi qu’à l’inverse, les communistes actifs dans la nation dominante doivent s’opposer à toute forme de chauvinisme à l’égard de la nation dominée. Ainsi seulement les travailleur.euses et les masses populaires des différentes nations seront convaincues de la possibilité et de la nécessité de s’unir au-delà des différences nationales afin de s’attaquer à leur ennemi commun, celui contre qui il est « temps d’être alerte », la bourgeoisie monopoliste qui se sert de ces divisions afin de mieux assoir sa domination.

Ara ès hora d’estar alerta dit l’hymne national catalan. Mais alerte contre qui? En défense de quoi? Si c’est défendre l’unité de la classe ouvrière, de la jeunesse et des peuples, sous le drapeau d’une Espagne républicaine comme celle de La Pasionaria, les communistes répondent présent et ne baissent pas la garde. Toutefois, si c’est être alerte pour défendre l’Estrellada au carré bleu, symbole d’une Catalogne intégrée à l’Union européenne; si c’est être alerte pour défendre le drapeau de la monarchie espagnole et faire primer sur l’unité du Capital espagnol, les communistes ne sauraient entrainer les masses dans cette voie dangereuse qui, au final, ne profiterait qu’à la bourgeoisie parasitaire et exploiteuse et ne changerait en rien à l’exploitation des masses populaires et de la jeunesse qui se retrouveraient, dans tous les cas, attachés au même pieux, à la même estaca, si ce n’est que la couleur en serait différente. 

lundi 9 octobre 2017

Manifestation: Canada hors de l'OTAN!- Canada out of NATO

Le Mouvement québécois pour la paix appel à une manifestation le Samedi 14 octobre à 14h afin de revendiquer la sortie du Canada de l'OTAN. Rendez-vous à la place du Canada!


samedi 7 octobre 2017

Opinion : Le problème de l'ASSÉ



JM publie une lettre qui lui a été envoyée à la suite du congrès de L'ASSÉ en fin de semaine dernière.

Wauki Wayra

L'Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante à tenu pendant la fin de semaine du 30 septembre au 1 octobre son congrès automnal. Lors de ce congrès, beaucoup de sujets sont ressortis et un plan d'action étoffé a vu le jour : la campagne féministe annuelle bat son plein en plus d'entreprendre une manifestation le 12 novembre prochain sur une base solidaire et antiraciste. Ce congrès a mobilisé l'attention des médias, chose qui n'était pas arrivée depuis longtemps. Malheureusement, ce fut en raison d'une nouvelle plutôt sombre : une motion pour la dissolution de l'ASSÉ avait été déposée.

La motion de dissolution a heureusement a été défaite. Reste que l'ASSÉ ne va pas bien. Ses structures se vident. Les actions qu'elle organise ne mobilisent que peut de militantes et militants. L'ASSÉ semble être à bout de souffle. Plusieurs échos résonnent encore dans ma tête. Nous sommes au congrès : comment se fait-il que si peu de délégations se sont présentées. Nous avions tout juste le quorum! Si quelqu'un partait, s'en été fini!

Comment un moteur d'unité, une organisation nationale qui a accompli ce que nous savons en 2005 et en 2012 peut-elle avoir autant de misère à mobiliser ses membres? À mon avis, le problème en soi de l'ASSÉ n'est pas dans sa structure ou sa motivation objective, non, le problème c'est que l'ASSÉ c'est éloigné de son mandat premier : défendre les étudiantes et les étudiants et la gratuité scolaire.

L'association en soi n'est presque plus reconnue, on ne voit que l'enveloppe sans même regarder le message. Je m'explique. En congrès, nous proposons, votons, pensons et agissons selon nos mandats d'association. C'est-à-dire que nous représentons un ensemble d'étudiantes et d'étudiants. Le problème de l'ASSÉ, c'est de vouloir imposer une vision du militantisme, du féminisme, du progrès... Jusqu'ici, tout va bien, mais pour combien de temps? En soi, de faire de l'éducation citoyenne, militante et engagée est respectable et je ne tente en aucun cas d'amoindrir le travail de moine que certaines et certains ont pu faire. Il est cependant primordial de constater un échec de la pratique.

Plusieurs pensent qu'un plancher doit rester entier, que les délibérations doivent avoir lieu entre délégations et non entre individus. Il ne faut pas rejeter le blâme sur ceux et celles qui coordonnent le congrès, mais se pencher sur le rôle des associations. En effet, nous avons très mal préparé ce congrès : très peu d'associations ont voté des mandats en assemblée générale départementale, donc, très peu de débats ou très peu d'orientations proposées par le plancher, outre la manifestation du 12 octobre. La démocratie de l'ASSÉ est mise à mal.

Enfin, la contradiction entre centralisation et décentralisation bat son plein. Alors que nous avons tous besoin de nous mobiliser sur le terrain et de FAIRE avancer la lutte, nous continuons de patiner dans des procédurites et des camps de formation (pareil à ceux qu'on a déjà assister) déguisés. Le problème de l'ASSÉ, c'est la division. Il y a une solution, bien qu'elle ait été fantôme pendant le congrès : revenir à notre mandat pour la gratuité scolaire... Nous avons oublié ce que c'est que l'ASSÉ, mais nous y reviendrons! Assos de toutes facultés, unissez-vous!


mercredi 4 octobre 2017

Bella Ciao

Alla matina, mi son svegliata, o bella ciao bella ciao bella ciao ciao ciao... 

Voici les premiers vers d’une chanson connue internationalement. Reconnue comme hymne de la Résistance du peuple italien contre la fascisme, Bella Ciao est entonnée par pratiquement tous les progressistes qui s'identifient à ce chant traduit en une soixantaine de langues, que ce soit en italien, français, anglais ou en arabe par exemple. Mais quelle en est l’origine ?
 
Si les versions sont nombreuses, dans plusieurs langues et avec plusieurs mélodies, il reste que la version qui semble faire école à travers le monde est, à peu de différences près, celle de Banda Bassoti (qui a participé au 18e Festival mondial de la jeunesse et des étudiants à Quito en 2013), des Modena City Ramblers ou de Maro Calliari, c’est à dire la version des partisans, la version partigiana.
 
Pourtant, peu sont ceux et celles qui savent qu’à la base, Bella Ciao serait dérivée d’une mélodie klezmer, donc juive d’Europe de l’Est, composée par Mishka Ziganoff: Koilen. Aussi peu nombreux sont ceux qui connaissent une autre version italienne, sans doute précédente à la version partigiana. Il s’agit de celle des Mondine, femmes travailleuses saisonniaires dans les rizières des plaines padanes et veneto-frioulanes du nord de l’Italie. Dans cette version, la mélodie est très semblable de la version des partisans, mais le texte en est différent principalement en ce sens qu’il se consacre principalement aux difficiles conditions de travail de ces femmes exploitées dans les rizières du nord de l’Italie, comme en témoigne la conclusion du chant :  « ma verra un giorno che tutti quanti lavoreremo in libertà » (un jour viendra où tous et toutes, nous pourrons travailler en liberté). La préséance de cette version sur celle du chant partisan est encore discutée, mais il semble que ce serait la trouvère Giovanna Daffini, engagée dans la Résistance italienne lors de la 2e Guerre mondiale qui aurait popularisé ce chant appris de son grand-père auprès des Résistants du nord de l’Italie. C’est ainsi que ce chant de travail, avec quelques modifications au texte, se serait ajouté aux hymnes de la résistance anti-fasciste.  
 
De là, comment en vient-on à un hit que la gauche internationale a fait sien ?
 
Il faut d’abord savoir que Bella Ciao n’était connu que d’un groupe assez restreint de résistants du nord de l’Italie. Lors de la 2e Guerre mondiale, le chant de ralliement de la Résistance étant plutôt Fischia il Vento, entonné sur l’air de Katioucha, donc ostensiblement pro-soviétique. Selon plusieurs en effet, Bella Ciao n’était connu que d’une minorité de résitant-e-s et de militant-e-s anti-fascistes, en particulier des communistes.
 
Il faut donc attendre le 1er Festival de la jeunesse et des étudiants, tenu à Prague en 1947, pour que la jeunesse démocratique et progressiste du monde, triomphante de la barbarie fasciste et nazie, entonne ce chant anti-fasciste. Si la jeunesse communiste et anti-impérialiste avait déjà fait sienne cette chanson dans les années d’après guerre, Bella ciao reste un chant politique lié à une mouvance politique. Il faut attendre le début des années 1960 pour que ce chant, notamment grâce à la version d’Yves Montand (militant de la jeunesse communiste jusqu’en 1968), connaisse un succès mondial.

samedi 1 juillet 2017

Canada 150: qu'y a-t-il à célébrer?



Comité central exécutif
1er juillet 2017

La YCL-LJC considère les mobilisations autour du 150e anniversaire du Canada, qui ont couté au moins 500 millions de dollars, comme des provocations de la part de la classe dirigeante aux peuples autochtones, victimes de l'impérialisme canadien, aux progressistes, à la jeunesse et à la classe ouvrière de ce pays. Nous joignons notre voix aux nombreux groupes qui dénoncent fermement la propagande et les tentatives de réécriture de l'histoire canadienne, comme si cette histoire devait être célébrée. Le Gouvernement du Canada tente de faire de cette journée du 1er juillet une fête à célébrer dans l'unité et dans la fierté. Néanmoins, plusieurs ne célèbreront pas la date de la signature de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique (AANB) qui a uni les dernières colonies britanniques d'Amérique du Nord au sein d'un dominion qui concrétise l'oppression nationale dans sa Constitution.

Pour la jeunesse des Premières Nations, Inuit et Métis, l'oppression nationale a été et continue d'être une réalité violente et actuelle qui fait partie des crimes de l'impérialisme canadien. Le génocide et le racisme anti-autochtone systémique font encore partie de la vie quotidienne des jeunes autochtones. Ceci est attesté par les innombrables exemples de forces policières qui commettent des abus sexuels et physiques auprès des jeunes femmes autochtones dans l'impunité la plus totale. Cette situation est également attestée par le peu de progrès dans le dossier de l'Enquête sur les femmes autochtones disparues et assassinées malgré la la demande publique pour cette enquête et la justice. Le leg des pensionnats de réforme, qui avaient pour but de "tuer l'Indien dans l'enfan", demeure frais dans la mémoire de la jeunesse qui souffre toujours, en conséquence, l'assimilation forcée et à qui il est impossible d'étudier dans sa langue nationale. La Loi sur les Indiens, qui prévaut toujours et qui a inspiré le régime d'Apartheid sud-africain, fait des peuples autochtones des citoyens de seconde catégorie. Demander aux nations autochtones de célébrer ce 1er juillet représente une rature de cette histoire coloniale violente, qui renforce le traumatisme intergénérationnel dans une ère de soi-disant réconciliation. Le Canada a été construit sur le vol des terres autochtones et ses 150 ans d'histoire ont dévasté les communautés autochtones.

Pour la jeunesse du Québec, les 150 ans écoulés depuis la signature de l'AANB sont marquées par l'inégalité et la discrimination. Ceci est reflété par le fait que, jusqu'à la Révolution tranquille, les travailleurs-euses québécois percevaient des salaires considérablement moindres que ceux de leurs collègues anglophones. Les opportunités pour la jeunesse québécoise étaient limitées. Plusieurs gains ont été obtenus grâce à la mobilisation de la jeunesse progressiste québécoise notamment, mais la question nationale est toujours en suspens et l'oppression nationale prévaut toujours. La signature de la Constitution canadienne sans l'inclusion du Québec en 1982 et l'adoption de l'Acte sur la Clarté référendaire dans la foulée du référendum de 1995, qui rend la séparation et l'auto-détermination du Québec pratiquement impossible, en est un autre exemple.

Pour la jeunesse acadienne et pour les jeunes issus des autres minorités nationales francophones, leur expérience des 150 dernières années sont des expériences de luttes pour vivre et étudier dans leur langue, puis pour maintenir des services publics en français à l'extérieur du Québec.

La célébration du 150e du Canada est également marquée par l'idée de la grandeur canadienne en tant que pays contribuant à la paix dans le monde. Le Canada n'a jamais été un pays qui promeut la paix dans le monde, mais le Gouvernement continue de perpétrer ce mythe tout en bénéficiant politiquement et économiquement, en toute discrétion, de la guerre, de l'occupation et de l'extraction de ressources naturelles à travers le monde. Ceci est évident par la feuille de route belliciste en Syrie et en Irak, par le soutien de régimes brutaux comme ceux d'Israël et d'Arabie Saoudite (à travers la vente d'armement s'élevant à des millions de dollars), et par son rôle dirigeant dans l'OTAN. Le gouvernement du Canada continue d'augmenter ses crédits de guerre. Récemment, il a annoncé une augmentation du budget militaire de 70%, augmentation qui lui permettrait d'implanter encore plus violemment ses plans impérialistes en Amérique Latine, en Afriqueet au Moyen-Orient en particulier.  Les monoples canadiens quant à eux poursuivent leur plan d'extraction des ressources naturelles malgré la résistance des communautés locales.

Jeunes communistes, nous nous rappelons la résistance contre les politiques capitalistes, génocidaires et colonialistes du gouvernement canadien à travers ces 150 dernières années, où d'importantes batailles ont été menées par la jeunesse, la classe ouvrière et ses alliés. Celles-ci incluent les soulèvements de la nation métis de 1873 et 1885, la Grève générale de Winnipeg en 1919, la Marche vers Ottawa pour l'Assurance chômage en 1935, la mobilisation pour la sécurité sociale ou, plus récemment, la grève étudiante de 2012 au Québec et le mouvement 'Idle No More'. Ces mobilisations représentent des exemples important qui font preuve que les forces vivent existent aujourd'hui au Canada pour aller de l'avant et exiger un changement fondamental.

Ce changement fondamental, néanmoins, n'arrivera que si nous travaillons dans l'unité contre notre ennemi principal: la classe capitaliste canadienne et l'impérialisme. Nous devons maintenir cette unité entre les mouvements sociaux et syndical, le mouvement féministe, étudiant; mais aussi entre ces mouvements au sein des différentes nations qui constituent le Canada. Travailler dans l'unité inclut le combat pour changer la constitution canadienne et exiger un nouveau partenariat libre, volontaire et consenti, de ces différentes nations. Cette Constitution devrait reconnaire le droit de chaque nation à l'auto-détermination, y compris et jusqu'au droit de se séparer.

Nous saluons l'appui sans cesse plus important à la lutte contre le leg colonial du Canada et son histoire d'oppression nationale tel qu'attesté par l'appel du mouvement 'Idle No More' "Unsettle Canada 150" soutenu par plusieurs organisations progressistes incluant la nôtre. Cet appel est l'occasion de se rappeler qu'il n'y a rien à célébrer 150 ans après la signature d'une Constitution qui a permis et même encouragé la marche des grandes compagnies vers l'accaparation des ressources naturelles aux dépens des peuples autochtones dont les territoires ancestraux ont été dévastés, qui a permis au Canada de poursuivre ses politiques génocidaires à l'égard des nations autochtones et qui a permis l'occupation des rues de Montréal par l'armée canadienne en octobre 1970. Plutôt qu'un jour de célébration, le 1er juillet au Canada devrait être un jour de résistance contre les tentatives de réécrire l'histoire du Canada d'une façon qui blanchirait les crimes du capitalisme, de l'impérialisme, du racisme et du colonialisme canadien.