vendredi 12 février 2016

Justice envers les femmes autochtones disparues et assassinées

Pour la plupart, le 14 février représente la Saint-Valentin, fête de l’amour et des amoureux. Dans les communautés autochtones toutefois, l’heure n’est pas tant à la réjouissance qu’à la commémoration.

Depuis 15 ans déjà, cette date marque le début des premières marches organisées en solidarité avec les familles des femmes autochtones disparues et assassinées et pour réclamer justice notamment en initiant une enquête indépendante à ce sujet. Selon la GRC, leur nombre s’élèverait à 1181; selon les associations de femmes amérindiennes, elles seraient plus de trois mille au bas mot.

Victimes d’une violence systémique qui prend racine dans le patriarcat et l’oppression nationale, elle-même résultant d’une politique génocidaire, les femmes autochtones forment une population plus à risque d’être agressée de toute forme que ce soit.

En effet, 80% d’entre elles ont été victime d’agression sexuelle. Bien qu’elles ne représentent que 4% de la population féminine du Canada, elles comptaient pour plus de 20% des victimes d’homicides à l’encontre des femmes en 2014 et de plus de 11% des femmes disparues au pays.

Depuis les années 1980, alors que le nombre d’homicides total est à la baisse au Canada, celui des femmes autochtones demeure plutôt stable, faisant passer leur taux de 9 à 21%, soit une augmentation de plus de 65% (voir le graphique ci-dessous).




Pour nous, jeunes communistes, ces chiffres ne sont pas qu’une statistique: ils cachent une réalité bien plus vile et inavouable dans un pays aussi riche que le nôtre qui se veut être un des champions du respect des droits de l’homme et de la démocratie.


«[Le Canada] a été bâti sur deux vols successifs: celui des Peuples autochtones et celui des travailleurs.» - S. B-Ryerson

Le gouvernement Trudeau, qui tranche avec l’intransigeance honteuse du gouvernement Harper, a promis l’ouverture d’une enquête pour les femmes autochtones disparues et assassinées ainsi que le respect des conclusions du rapport de la commission Vérité et réconciliation. C’est tant mieux. Mais quelles en sont les motivations réelles? Est-ce par volonté sincère d’octroyer aux Premières Nations tous les éléments nécessaires pour garantir leur développement dans leur droit le plus strict à l’auto-détermination? Nous sommes en droit d’en douter, même si d’une certaine façon, nous devons nous féliciter que grâce aux mobilisations et actions successives (l’une d’elles étant le mouvement populaire Idle No More), la plupart des politiciens ont été sommés d’accorder une certaine attention à la cause des peuples autochtones.

Comment croire en effet que le parti politique à l’initiative de la Loi sur les Indiens, qui ne fait qu’entériner le statut des peuples autochtones comme «inférieur», un peu à l’image du système légal d’apartheid qu’elle a inspiré en Afrique du Sud; espère réellement mettre fin à cette oppression? Pourquoi ce parti, qui a pris plus de dix ans avant de considérer sérieusement les recommendations du rapport Erasmus-Dussault, est aujourd’hui si prompt à prendre en compte celles du rapport de Vérité et Réconciliation si ce n’est grâce à la mobilisation des Premières nations et / ou par pur jeu politicien abject? Comment croire enfin en la sincérité des Libéraux qui affirment vouloir établir un «nouveau partenariat» avec les peuples autochtones alors qu’ils se refusent de changer ne serait-ce qu’une virgule de la Constitution canadienne qui ne fait qu’entériner légalement l’inégalité et l’oppression nationales dont sont victimes de première ligne les Premières nations?

Pour se rappeler qu’il n’est pas question d’une simple question criminelle et judiciaire, mais plutôt de la conséquence d’un système qui génère l’aliénation des nations autochtones, nous pouvons souligner le récent exemple des victimes d’abus sexuel par les policiers de Val d’Or. Sur les 40 «agents de la paix» que compte la MRC, huit ont été formellement mis en cause dans des cas d’agression à l’égard de femmes autochtones de la région, soit près de 40% des effectifs de police. Devant un tel taux, difficile de croire qu’il s’agit de simples actes criminels; d’autant plus lorsque l’on sait que cette situation s’étend à l’ensemble du pays.

Ainsi, nous, jeunes communistes du Québec et du Canada, estimons qu’il est plus que nécessaire de bâtir un nouveau partenariat libre et consenti entre les différentes nations constituantes du Canada (soit les nations amérindiennes, inuit, métis, québécoise, acadienne et canadienne anglaise) garantissant à chacune d’entre elle le droit le plus total à l’autodétermination, y compris celui de la séparation.

Il ne fait aucun doute que sans ce consensus égalitaire entre toutes les nations du Canada, la classe dominante sera toujours plus à même de nous diviser entre jeunes et moins jeunes, Québécois et Canadiens, Autochtones et non-Autochtones, immigrés et non-immigrés. Ceci a pour conséquence fâcheuse de miner toute tentative d’unité de la jeunesse et des masses populaires contre l’ennemi commun des peuples: le capitalisme monopoliste menant à l’impérialisme. Que la résistance soit menée par les étudiants du Québec contre les hausses de droits de scolarité, de la nation Tsilhqot’in en lutte contre les oléoducs traversant leur territoire légitime ou par les Cris et Inuit du Nunavik qui tentent d’exercer leur droit au gouvernement responsable sur leurs territoires ancestraux; toutes ces luttes représentent une forme de mobilisation contre ce système qui ne perpétue que crises et exploitation.

À ce sujet, l’Assemblée générale de la Fédération mondiale de la jeunesse démocratique (l’une des plus importantes organisations de jeunesse anti-impérialiste) a justement identifié que «l’un des principaux aspects de l’impérialisme est la division des peuples afin de servir ses intérêts. Le capitalisme perpétue la double exploitation et le patriarcat dont l’une des expressions les plus manifestes est l’inégalité de genre. […] Les peuples autochtones comptent, à travers le monde, parmi les plus opprimés puisqu’ils sont confrontés à l’exploitation nationale et, dans plusieurs cas, subissent des politiques génocidaires mises en place par les forces impérialistes.»

En ce sens, les femmes autochtones, à travers leur mobilisation, combattent ces deux aspects de la barbarie capitaliste. Nous nous solidarisons entièrement avec leur mouvement et, pour la 15e année consécutive, demandons que justice soit fait pour les femmes autochtones assassinées et disparues. Comme premier pas, il est plus qu’urgent d’initier une enquête indépendante à ce sujet, mais ceci ne saurait être que le début de nouvelles demandes et mobilisations encore plus massives car la route est encore longue et tortueuse avant d’atteindre l’égalité et la pleine justice pour les femmes et les peuples autochtones en général.

Dimanche 14 février à 15 h au métro Saint-Laurent, bravons le froid et battons le pavé en solidarité avec les femmes autochtones! Soyons une voix de résistance forte, unie et militante!


ᐱᓇᓱᑦᑏᑦ  ᓄᓇᓕᒫᓐᓂᑦ  ᒪᑭᓚᐅᕆᑦᓯ!
Llamkapakuq tukuy llaqtamanta huñunakuychik!
Otatoskewak ota kitaskinahk mamawentotan!

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