Marianne Breton Fontaine
Le 25 mars
2012, Mathieu Bock-Côté avait écris sur la haine des étudiant-e-s. C'était en
plein cœur de la grève des carrés rouges contre la hausse des frais de scolarité
de Jean Charest. Cette haine contre les étudiant-e-s, on la sentait partout, et
elle faisait peur. Par exemple, moi et mon garçon, alors âgé de 2 ans, nous nous
étions fait menacer par un camion qui nous fonçait dessus durant une
manifestation. Mon fils avait eu très peur. Ce genre de menaces étaient
courantes. Même des vedettes de télé ne se gênaient pas de le dire, comme Alex
Perron qui avait raconté à la télévision que « si j’en frappe un (avec sa
voiture), ça ne me dérange même pas ». Cette haine, elle déferlait sur les
médias sociaux, de l'insulte grossière à l'appel au meurtre. Les opposant-e-s à
la grève saluaient la violence policière et se réjouissaient des blessés graves
comme Maxence Valade qui en perdis un œil.
Mathieu
Bock-Côté est un commentateur de droite qui nous avait habitués à s'insurger contre
toute action et revendication de la gauche. Pourtant, cette fois-là, malgré son
opposition à la grève il disait :
« Mais surtout, on en veut aux jeunes
de ne pas désirer s’intégrer pleinement à l’ordre établi, avec un emploi plus
ou moins payant, mais souvent asservissant, qui sera compensé par du temps
libre dont ils pourront jouir en faisant l’expérience des grandeurs et misères
de la société de consommation ou en vouant leurs soirées aux nombreuses
émissions visant à les abrutir massivement.
(...) Se pourrait-il, en fait, qu’on en veuille aux étudiants de ne pas se coucher? De ne pas se rallier à un monde que nous savons au fond de nous-mêmes insatisfaisant, qui étouffe l’âme, assèche le cœur et nous condamne à l’errance la plus désespérante? Comme si on disait : nous nous y sommes pliés, pourquoi ne font-ils pas de même? »
(...) Se pourrait-il, en fait, qu’on en veuille aux étudiants de ne pas se coucher? De ne pas se rallier à un monde que nous savons au fond de nous-mêmes insatisfaisant, qui étouffe l’âme, assèche le cœur et nous condamne à l’errance la plus désespérante? Comme si on disait : nous nous y sommes pliés, pourquoi ne font-ils pas de même? »
Ce fut cette
rare fois où j'ai été touchée par les mots de Mathieu Bock-Coté. Il avait visé
juste. Cette société insatisfaisante, vide de sens, elle s'étale encore comme
le futur des jeunes. La différence avec les générations passées, c'est que ma
génération et celles qui suivent sont les premières à avoir un avenir plus noir
que leurs parents. On nous demande de plier devant l'ordre établi, de suivre en silence, mais cette
fois, seulement avec le bâton. Le système ne nous offre même pas la petite
carotte qu'il a brandi devant les générations passées.
« Il est malheureux, en fait, que les
jeunes grévistes n’aient à brandir contre le capitalisme devenu fou qu’une
social-démocratie encroutée, financièrement en ruine, étrangère au réalisme
budgétaire et à l’équité intergénérationnelle. Mais peut-on leur en vouloir?
Personne n’a vraiment de projet alternatif à brandir pour redresser notre
société déréglée. Leur impuissance est aussi la nôtre. »
Il avait
encore mis le doigt sur quelque chose d'essentiel. La social-démocratie est en
ruine et n'offre pas de solution. L'expérience grecque avec Syriza, la
coalition de la "gauche radicale",
exprime bien cette ruine et cet échec. Bien sûr, pour Mathieu Bock-Côté, ce
renouveau du système, l'alternative, se trouve du côté de la droite
identitaire. Radicaliser le système capitaliste, opter pour un nationalisme étroit
et identitaire. C'est justement la voie du nationalisme identitaire, avec pour corollaire
la montée l'extrême-droite raciste, qui prend racine en Grèce aujourd'hui.
La vraie
alternative reste pourtant de changer le système lui-même. Pas de renouveau du capitalisme,
pas de capitalisme à visage humain, un nouveau système, de nouvelles bases.
L'alternative c'est le socialisme. Plusieurs rêvent du socialisme, ils et elles
l'imaginent avec passion sans nécessairement y mettre le mot socialisme. Ils et
elles imaginent cette société égalitaire où nous pouvons déterminer
collectivement l'action humaine selon les besoins diversifiés de l'humanité et
de la nature, et non pas sous la seule règle du profit. Malheureusement, après
plusieurs décennies de propagande anticommuniste, plusieurs ont encore peur de brandir
le drapeau rouge, et surtout de rejoindre le Parti communiste. C'est pourtant
le moyen de changer radicalement notre société.
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