Par Marianne Breton Fontaine
La question du mouvement des Femens est revenue sur la page du groupe Facebook sur l’égalité des genres et des sexes de la Ligue de la jeunesse communiste à quelques reprises. D’abord parce que ce mouvement a réussi à attirer l’attention des médias avec ses coups d’éclat, et ensuite parce qu’il existe une grande suspicion à son égard. Viktor Sviatski, cet homme hautement sexiste et dominateur derrière les Femens, mais rejeté en 2013 par le mouvement qu’il a créé, a largement contribué à discréditer ce groupe. Discrédit qui n’a fait qu’augmenter avec les nombreuses entrevues de Femen qui, se targuant d’apporter une nouvelle vague féministe, ne semblaient pas toujours savoir grand-chose du féminisme. Leur « exhibitionnisme » a été vu par certain-e-s comme la continuation de l’objectification du corps des femmes, à commencer par le fait que seules des jeunes femmes dans les standards de beauté normalisée semblent se prêter à cet exercice de nudité subversive.
La critique est facile, mais au-delà du groupe lui-même, il
faut constater que les Femen ont raison sur un point majeur : nos seins sont
politiques. Au Québec, en plein débat sur la charte, les Femens qui se sont
présentées à l’Assemblée nationale sein nu en scandant « Crucifix, décalisse! »
étaient menacées d’être accusées d’exhibitionnisme, car montrer sa poitrine
publiquement est considéré comme une offense pour les femmes — et seulement
pour les femmes. Lorsque le mouvement Femen à fait son apparition dans le médias chez nous, les réactions de rejet ont été assez rapides,
les analyses sont venues ensuite. C’est que leurs actions défient en effet des
normes patriarcales bien intégrées. Dans la même veine, certaines personnes se
sont insurgées du traitement de Facebook (et d’autres médias sociaux) aux
photographies contenant des poitrines nues. Des images d’allaitement et relative
aux traitements du cancer du sein ont entre autres été retirées, car considérées
comme inappropriées, alors que les pages Facebook dégradant le corps des femmes
comme un simple objet sexuel pullulent. Le corps des femmes est aujourd’hui mis
à nu seulement lorsqu’on le chosifie, le commercialise. Et on n’ose pas voir le
corps des femmes qui ne correspondent pas aux normes de beauté occidentales. Le
fait que des femmes se réapproprient leur propre corps et l’image de ce corps
est au contraire de plusieurs critiques anti-Femen un véritable acte de
défiance fidèle au féminisme. Cette réappropriation doit s’étendre à tous les
corps féminins. (Cela, sans transformer la nudité en obligation ou en une valeur morale
supérieure bien entendu. Remplacer un code par un autre n'est jamais une
réappropriation). Cela dit, on ne peut nier que le discours que les Femens
attachent à ces actions est malheureusement lui, bien insuffisant. Il est
malheureux en fait que la nudité comme arme militante ne soit principalement utilisée
en ce moment que par le groupe Femen, et uniquement dans un contexte de
relation aux médias.
Sans entrer dans une nudité complète, en 2012, les étudiant-e-s
en grève avaient défiés ce code moraliste et s’était présenté nu dans les Ma-nu-festation. Des femmes marchaient
alors, poitrine nue, avec d’autres personnes plus ou moins vêtues. Cette action
originale participait aussi à cette réappropriation nécessaire de notre corps
dans un acte de défiance. La nudité n’est pas qu’exhibitionniste ou sexuelle, elle
peut aussi être militante.
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