dimanche 4 avril 2010

Article pour le prochain JM

Le collectif Échec à la Guerre organise un sommet populaire contre la guerre et le militarisme en novembre 2010. Il arrive deux ans après le succès des Audiences populaires pour le retrait des troupes canadiennes de l'Afghanistan de février 2008, qui avaient réussies à faire converger pour une première fois les oppositions à la guerre. L’objectif principal du Sommet est de renforcer le mouvement québécois d'opposition à la guerre et au militarisme en ce qui a trait à sa réflexion, à ses revendications et à son unité d'action, comme le mentionne le collectif dans son communiqué. À l’approche de ce sommet, Jeunesse Militante à tenue à en savoir davantage.

Raymond Legault, un des porte-parole du Collectif, a accepté de répondre à nos questions.

JM : Vous dites que votre objectif est de renforcer le mouvement québécois d'opposition à la guerre et au militarisme en ce qui a trait à sa réflexion, à ses revendications et à son unité d'action. Comment le sommet va t-il permettre d‘atteindre cet objectif ?

RL : Notre mouvement, malgré un sentiment populaire favorable à ses objectifs, est loin d'être arrivé à forcer le retrait des troupes canadiennes de l'Afghanistan ou la tenue d'un réel débat public sur les dépenses militaires au Canada. Pour se rapprocher d'un tel objectif, nous pensons qu'il faut dépasser les bons sentiments pacifistes et fonder notre action sur une meilleure compréhension de la conjoncture qui a conduit à cette montée du militarisme au Canada, du rôle que joue l'OTAN -- dont le Canada fait partie -- au service de l'empire étasunien, des violations du droit international par le Conseil de sécurité des Nations Unies (violations que le Canada endosse), etc. Pour faire avancer cette compréhension, le Collectif a préparé quatre documents de réflexion (http://www.echecalaguerre.org/index.php?id=194).

Pour que le Sommet contribue à renforcer notre mouvement, il faudra surtout une bonne période préparatoire. D'ici au Somment, nous souhaitons en effet que les organismes de la société québécoise mènent des débats en leur sein sur ces enjeux importants. Dans la mesure où ces discussions auront lieu, nos revendications pourront aller au-delà d'un appel au retrait des troupes... en attendant la prochaine guerre du Canada dans le sillage des États-Unis. Dans la mesure où ces discussions auront lieu, notre action pourra être ravivée.

JM : La guerre en Afghanistan et le virage militaire pris par Harper c‘est l‘affaire de tout le Canada. Ne croyez vous pas que pour mettre véritablement en échec les politiques impérialiste du gouvernement, il faudrait un mouvement pour la paix plus uni dans l’ensemble du Canada ?

RL : Il est certain que c'est au niveau pan-canadien qu'une telle lutte se mène et peut, ou non, être gagnée. L'unité du mouvement au plan canadien est un enjeu certes, mais, pour nous, les autres questions dont nous venons de parler sont déterminantes pour le renforcement du mouvement à l'échelle canadienne justement. D'ailleurs, le Collectif est en liaison étroite avec l'Alliance canadienne pour la paix qui chapeaute une grande partie du mouvement en dehors du Québec. Et nous avons à maintes reprises lancé des appels conjoints à l'action pour protester contre les guerres en Irak et en Afghanistan.

JM : Est-ce important d’assister au sommet en tant qu‘individu?

RL : Absolument ! C'est important, il me semble, autant pour les individus que pour le succès du Sommet et de notre mouvement. Individuellement, on peut d'abord contribuer à la période de préparation du Sommet en suscitant des discussions sur la guerre et le militarisme au sein des groupes, associations, coops, etc. dont on est membre, si c'est le cas. Et participer au Sommet lui-même devrait être une occasion privilégiée de contribuer -- avec des gens de partout au Québec -- non seulement à la réflexion mais aussi à l'élaboration de pistes d'actions concrètes sur des enjeux tels le recrutement militaire dans les écoles, les dépenses militaires versus dépenses sociales, le féminisme et militarisme, l'environnement et militarisme, la nécessité ou non d'une armée, etc. Même si le Collectif Échec à la guerre est d'abord un regroupement d'organismes, il n'en demeure pas moins que le succès de tous les mouvements repose avant tout sur l'engagement personnel d'un très grand nombre d'individus préoccupés par les grandes questions qui fondent l'action de ces mouvements.

JM : Le recrutement militaire des jeunes devient de plus en plus agressif sur les campus des collèges et des universités et un des thèmes du sommet est justement la question du recrutement militaire dans les écoles. Que dites vous aux étudiantes et aux étudiants et leurs syndicats pour les inciter à participer ?


RL : L'intensification marquée des activités de recrutement militaire, non seulement dans les collèges et universités mais aussi dans les écoles secondaires et même primaires, est une manifestation particulièrement dérangeante de la montée du militarisme au Canada. Cette vaste campagne de recrutement et de relations publiques est d'ailleurs omniprésente, non seulement dans les institutions scolaires, mais dans les centres d'achats et dans la plupart des grands événements sportifs et culturels : coupe Stanley, coupe Grey, coupe Memorial, fêtes des 400 ans de Québec, marathon de Montréal et jusqu'à la Fête des Neiges à l'Ile Ste-Hélène. On n'a jamais assisté à une telle offensive à l'époque où l'armée canadienne se concentrait sur les missions de Casques bleus des Nations Unies et recrutait avec le slogan "si la vie vous intéresse". Aujourd'hui, le Canada est carrément en guerre et son message de recrutement repose sur l'excitation du risque, la puissance et la haute technologie des équipements militaires, le combat comme dans les jeux... mais en vrai. D'autre part, avec ses promesses d'un excellent salaire dès le début et d'une formation spécialisée gratuite, il devient particulièrement attrayant pour les jeunes sans-emploi.

La lutte contre le recrutement militaire dans les écoles est un enjeu central de la lutte contre la guerre et le militarisme. Il faut remettre les pendules à l'heure en rappelant que la guerre c'est d'abord tuer et détruire. Et que c'est généralement pour prendre le contrôle des autres pays et de leurs ressources et non pour libérer qui que ce soit. Il faut aussi exiger que la société offre aux jeunes des milieux défavorisés d'autres perspectives pour s'en sortir que d'aller risquer leur vie à tuer leurs semblables dans d'autres pays. Une nouvelle coalition contre le recrutement a vu le jour au Québec il y a quelques mois, regroupant des associations étudiantes et des syndicats de l'enseignement. C'est une nouvelle phase encourageante qui débute pour ce mouvement.

JM : Un dernier mot à nos lectrices et nos lecteurs ?

RL : Avec la montée du militarisme, la dégradation délibérée des services publics, les attaques contre les libertés civiles et les droits sociaux, la destruction de l'environnement et l'écart grandissant entre riches et pauvres -- internationalement et au sein de notre société -- nous traversons une période historique plutôt sombre. Les enjeux sont graves et l'ampleur de la tâche pour renverser ces tendances est immense. Mais tous ces problèmes sont le résultat des décisions d'une minorité des êtres humains, auxquelles nous pouvons choisir d'acquiescer par notre silence et notre inaction ou de nous opposer par une réflexion et une action solidaires. Il est possible de renverser la vapeur si nous mettons, toutes et tous, l'épaule à la roue. La préparation et la tenue du Sommet québécois contre la guerre et le militarisme constituent un pas dans cette direction. J'invite donc vos lecteurs et lectrices à s'y engager dès maintenant !

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